TT51, la tombe d'Ouserhat ou , encore appelé Neferhebef .

Tout d'abord une petite mise au point : il existe deux personnages nommés Ouserhat dont les tombes sont relativement proches dans la nécropole thébaine. L'une porte le numéro TT 56 (nous l'avons déjà publiée sur OsirisNet), l'autre, qui nous occupe ici, est la TT 51.

Elle a été creusée dans la colline de Cheikh abd el-Gournah, au nord-est d'une grande cour qui donne accès à quatre tombes importantes (voir ) : la TT 50 de Neferhotep (XVIIIe dynastie, époque d'Horemheb), la TT 51 d'Ouserhat (XIXe dynastie, époque de Ramsès I et Sethy I), la TT 111 d'Amenouahsou (XIXe dynastie, époque de Ramsès II) et enfin TT 30, la sépulture de Kensoumes, plus tardive. La plus grande partie de la vaste cour est aujourd'hui occupée par le porche en briques et l'avant-cour entourée d'un mur de briques de la TT 30 (ouserhat51_dm_222 et 844) dont la partie droite (est) constitue la partie ouest de la cour d'Ouserhat.

La tombe a été découverte en 1903 par Sir Robert Mond. En 1909, Norman de Garies Davies, qui travaillait pour le Metropolitan Museum of Arts, entreprend une fouille et un nettoyage complet du monument. En 1927, il en publie la description princeps qui montre que, bien que le décor se limite à la première salle, sa qualité en fait une des plus belles tombes de Thèbes.
En 1941, la TT 51 est victime de pilleurs et de vandales qui détachent cinq grands fragments de la décoration des parois puis découpent les yeux de la plupart des visages. Nous ne disposons plus pour ces scènes que de l'ouvrage de Davies. Depuis, certains de ces dégâts ont néanmoins pu être réparés. Depuis plusieurs années, les parois sont protégées par des vitres.

Traductions et dessins
Dans les pages qui suivent, la plupart des traductions de textes hiéroglyphiques ainsi que certains dessins et quelques photos n&b sont basés sur ceux de l'ouvrage de Norman de Garis Davies, publié en 1927 par le Metropolitan Museum of Arts : "Two Ramesside Tombs at Thebes"

Le propriétaire et sa famille

Le propriétaire se nomme Ouserhat, écrit ou , connu aussi sous le surnom de Neferhebef qu'on retrouve dans la tombe. Il porte le titre de "Grand prêtre (ou Premier des Prophètes) du Ka royal de Aakheperkare". Il s'agit du pharaon Thoutmosis I, fils d'Aménophis I, qu'Ouserhat a servi dans son Temple de Millions d'années, sous Ramsès I et Sethy I, sous le règne duquel il est mort.
Entretenir le culte à un pharaon défunt était un devoir pour le souverain régnant. Les Temples de Millions d'Années (dits funéraires) en étaient le moteur. Dotés de terres, de bétail, de navire, … ils disposaient également d'une main-d'œuvre servile ou non. Les principaux postes de responsabilités de leur administration étaient volontiers héréditaires, comme c'est le cas pour Ouserhat et sa famille chez qui la grande prêtrise est transmise de père en fils.
Thoutmosis I, troisième roi de la XVIIIe dynastie, a régné de 1504 à 1492 av. J.-C. (chronologie de Shaw), et son culte est donc encore vivant au temps de Sethy I, deux siècles plus tard.
Ce culte des rois ancêtres est particulièrement développé au début de l'époque ramesside. En effet, ces derniers sont des roturiers qui se sont hissés sur le trône et il est politiquement important pour eux de se rattacher à l'ancienne lignée Thoutmoside (voir l'article ).

Son père se nomme Khensemhab et sa mère Taousert .

Son épouse est Hatchepsout (souvent réduit au diminutif de Chepsout). Ouserhat avait deux autres femmes qui ne sont pas ou plus nommées dans le monument.

Ses enfants : deux fils sont mentionnés sur la stèle de la cour : Ra-emouia et Houy , mais il est possible qu'il y ait eu d'autres enfants.

Architecture et aspect d'ensemble

Comme le montre le plan ci-contre, l'orientation géographique vraie du monument va du sud-ouest au nord-est. Toutefois, pour se conformer à la norme en égyptologie et parce que c'est ainsi que le concevait les Égyptiens de l'antiquité, nous considérerons tout le complexe, y compris la cour, comme étant orienté de l'est vers l'ouest, orientation symbolique qui correspond au voyage du défunt de ce monde vers l'au-delà.

Après la cour et le petit passage d'entrée, on aboutit dans une première salle transversale, qui est la seule pièce décorée de toute la tombe.

Immédiatement en face de l'entrée se trouve l'ouverture d'un autre passage menant dans une pièce grossièrement carrée, dont le plafond est soutenu par quatre piliers rocheux. Plafond et piliers ont été grossièrement aplanis à l'aide d'une couche de limon. L'extrémité ouest de cette salle se prolonge sans véritable décalage dans une petite chapelle funéraire ; au fond, se trouve l'ouverture du passage descendant qui se termine, après un coude, par une zone surélevée destinée à recevoir le cercueil du défunt. Devant l'entrée de ce passage se trouvent les restes d'une petite zone formée de briques.
Dans la salle à piliers se trouvent deux autres inhumations : l'une, dans le coin sud-ouest, est une petite zone à fleur de sol ; l'autre dans le coin nord-ouest est constituée par un puits peu profond, entourée d'une zone rocheuse surélevée, qui donne accès à une chambre funéraire grossièrement taillée. Ce contraste entre une chapelle soignée et une chambre funéraire grossière est fréquent dans la nécropole thébaine.
De nos jours, l'accès est limité à la salle longitudinale et à une sorte de couloir qui a remplacé la salle à piliers, les espaces entre ces derniers ayant été bouchés.

Cour et entrée de la tombe

On entre de nos jours dans la cour de la tombe d'Ouserhat par un escalier qui se trouve à droite du mur d'enceinte de la TT 30. La cour est surbaissée par rapport au reste de la cour commune et de forme irrégulière, plus large au niveau de l'entrée (3,3m) qu'à l'autre extrémité (2,2m) ; sa longueur est d'environ 6m. En raison des risques d'inondation lors des rares, mais violents orages de la région thébaine, le niveau de la cour se trouvait, dès l'antiquité en dessous du niveau du passage d'entrée au niveau duquel les carriers ont ménagé une marche.

1) - La stèle

Au niveau du mur sud se trouve la partie inférieure d'une stèle en calcaire qui, actuellement, mesure 0,92m de haut pour 1,10m de large. Initialement, elle était entourée et protégée par des montants en grès, dont on peut encore apercevoir un fragment sur . On suppose qu'elle devait être rectangulaire, avec à son sommet une corniche. En face se trouvait une sorte de plateforme en maçonnerie, peut-être pour déposer des offrandes. Elle porte gravée des portions du rituel funéraire pour Ouserhat, qui auraient normalement dû se trouver dans la salle à piliers qui, rappelons-le, n'a jamais été décorée. À la partie supérieure se trouve des images du déroulement des rites, avec à gauche, le cercueil redressé d'Ouserhat avec, agenouillée devant lui, sa femme Hatchepsout en train de se lamenter, accompagnée de deux des fils. Deux prêtres, qui se tiennent chacun à côté d'une pile d'offrandes, dirigent la cérémonie et font l'encensement.
En dessous, on trouve huit lignes de texte avec une offrande invocatoire traditionnelle ainsi que les noms de membres de la famille :
"Une offrande invocatoire à Amon-Rê, à Atoum, à Horakhty, à Geb, à Osiris, à Isis, dame de l'occident, à Hathor, qui réside dans la nécropole, à Anubis, premier dans la salle du dieu, à la compagnie des dieux… [aux dieux] et déesses qui s'y trouvent, aux grands de la nécropole, au temple du sud, au temple du nord, à la barque Sektet, à la barque Mandjet, aux dieux qui sont dans l'au-delà et sur terre. Puissent-ils accorder de l'eau fraîche (?) et le souffle de la brise, que son Ba ne soit jamais repoussé, que ton nom soit appelé et vienne lors de chaque fête, sans interruption, que tu puisses voir Rê à l'aube et suivre Sokar de Ro-setaou, que tu puisses voir les dieux sur (leurs) trônes, que Rê t'accorde le passage dans la barque Sektet, que l'Ouest t'accueille, que des libations soient faites sur les offrandes, que (tu) reçoives les offrandes d'un dieu, et que Hapi te donne toute sorte de bonne nourriture, des milliers de pains, bière, têtes de bétail, gibier d'eau, étoffes, lin, graisse, encens, vin, lait, légumes, parfums, fleurs… [pour le Ka] du grand prêtre de [Aakheperkare, Ouserhat] juste de voix. Il dit : 'Mon rang (?) était celui d'un prêtre-ouab (?)… l'autel du dieu, grand prêtre de… [né de la maîtresse de maison], [le chanteur de] Montou, seigneur de On, Taouseret. [Son épouse], la maîtresse de maison [Hat]chepsout. Son fils, Raemouia, son fils… ".

2) - Les colonnes extérieures

()

Il reste, à droite de l'entrée, la base en grès d'une colonne (indiquée en plein sur le plan). Elle pouvait faire partie d'une paire, supportant dans ce cas une sorte d'auvent, voire s'associer à deux autres pour former un portique le long de la façade (les trois colonnes possibles sont en pointillés).

3) - Le mur de façade

(partie ouest de la cour)

Il mesure environ 6m de long et il est centré par l'entrée menant vers l'intérieur du monument. Cette dernière était, à l'origine, flanquée de deux piliers en grès (aujourd'hui, ils sont en béton…). Il n'y a pas trace de décor sur la façade, mais la zone aplanie et lissée de la paroi a quasiment disparue, hormis un petit fragment en bas à gauche. À gauche de la porte aurait pu se trouver une autre stèle.

4) - L'entrée

Comme déjà mentionné, son niveau est surélevé par rapport à celui de la cour. Le passage mesure 1,80m de long et 1,20m de large ; sa hauteur, un peu irrégulière, est de 2m. Initialement, elle était fermée par une porte en bois tournant dans des pivots en grès. Sur le mur du côté droit du passage se trouvait une image du propriétaire entrant dans sa tombe, un hymne à Rê et un texte assurant le défunt qu'il "prendra possession de sa tombe pyramidale… et il cèdera (?) son bâton au cercueil" (c'est-à-dire qu'il s'allongera pour se reposer). On remarquera qu'il n'y a jamais eu de pyramide par-dessus cette tombe.
On pénètre dans la première salle en descendant un petit escalier (voir ).