ENTRÉE
L’entrée de la tombe se trouve dans la partie Sud de la cour, légèrement décalée vers la droite (). La largeur de la porte est de 0,76m, l’épaisseur de 0,45m, la hauteur (reconstruite) est de 1,90m.
Ses montants sont décorés de textes très mutilés, disposés en trois colonnes de chaque côté (). Les colonnes les plus proches de l'ouverture ont disparu ; celles du milieu persistent focalement, surtout à droite ; les plus externes sont mieux conservées.
A gauche, le texte s'adresse à "Osiris, le Dieu grand"
() et demande la sortie au jour, "pour le Ka de l'enfant du Kep, le scribe, Ouserhat"
. On remarque que le mot "Osiris", n'a même pas été martelé par les zélateurs d'Akhenaton ; pourtant le grand dieu du monde souterrain n'avait plus rien à faire dans la théologie amarnienne. On reconnaît aussi, très abîmé, la fin du nom de Ra-Horakhty.
A droite, on distingue encore les noms d'Anubis et de Hathor, maîtresse de Thèbes ().
Le linteau est abîmé, mais on reconnaît tout de même une partie du décor (). Il s'agit de deux représentations dos à dos d'Osiris assis, auquel Ouserhat, suivi de son épouse, fait une offrande. À gauche, le dieu, coiffé de sa mitre et le menton orné d'une longue barbe recourbée, tient en main son fouet Nekhakha, ainsi qu'un grand sceptre dont la partie supérieure a disparu. Devant lui se dresse une table à offrandes. De l'autre côté, Ouserhat tend ses deux mains levées, en signe d'adoration. Debout derrière lui, son épouse tient à deux mains trois longues tiges, probablement des papyrus ().
Du côté droit, Osiris tient un sceptre (Ouas ?) et tend un signe de vie ankh au-dessus de la table d'offrandes. Ouserhat est représenté quasiment à l'identique des deux côtés. L'épouse brandit cette fois une composition florale plus complexe, comportant une tige de papyrus autour de laquelle s'enroulent des convolvulacées (). On remarquera que les époux sont en grands habits d'apparat, avec de longues perruques (surtout pour elle).
Le couloir est bordé de parois de 1,38m de large, sans décoration (disparues?). Deux larges marches inclinées descendent dans la salle transversale A, perpendiculaire au couloir et située 1m plus bas que le niveau de la cour.
SALLE TRANSVERSALE (barre du "T")
Longueur Est-Ouest = 10m ; Largeur Nord-Nord = 1,86m (O) et 2,20m (E) ; Hauteur = 2,55m.
Ce type de salle est aussi nommé antichambre.
LES PLAFONDS
Les plafonds sont particulièrement bien conservés. Les motifs géométriques se disposent sous forme de caissons rectangulaires séparés par des bandes jaune-orangé, symbolisant des nattes reposant entre des poutres, comme on les trouvaient dans les maisons d'habitation. Les fausses poutres sont jaune-orangé, entourées d'un liseré blanc, lui-même centré par une ligne rouge. Des textes sont présents uniquement dans la salle B.
Dans l'axe de l'entrée, on trouve trois de ces fausses poutres peintes. Entre elles, la décoration se compose de cercles rouges juxtaposés, avec remplissage bleu, avec un rouge plus orangé entre les cercles.
Latéralement, chaque hemi-salle A1 et A2 -qui représente une barre du "T"- comporte trois fausses poutres transversales, délimitant deux caissons rectangulaires. Les motifs, en nid d’abeille, sont constitués de longues lignes brisées régulières, rouges et bleues, sur fond blanc ; elles encadrent des losanges, jaunes à pois ou blancs comportant des rosettes à quatre feuilles. Ces motifs, avec ces couleurs, sont typiques de la XVIIIème dynastie. Ce sont également eux qui décorent le plafond de la salle B.
A1, MUR Nord
Longueur = 4,90m.
La pièce A1 correspond à la portion de hall située à main gauche en entrant. Le mur est celui situé du côté de l'entrée. Il est en rapport avec certaines des occupations profanes du défunt. Les Égyptiens les placaient en principe à l'Est, domaine du soleil levant et des vivants.
Ouserhat a deux responsabilités principales : le comptage et le marquage des bovins d'une part, l’enregistrement des récoltes et la distribution du pain d'autre part.
Le comptage des bovins occupe le registre supérieur et il est subdivisé en trois alors que les activités liées aux céréales se trouvent sur le registre inférieur et se subdivisent en deux.
Toutes les activités sont focalisées sur l’image cinq fois répétée d’Ouserhat.
1) - Le rituel d'offrande
La paroi commence par un rituel d'offrandes réalisé par Ouserhat, assisté de sa femme Moutneferet et d'une de ses filles en faveur d'Osiris, mais aussi de "Hathor, maîtresse de l'Occident"
. On remarque le coloris rose donné par l'artiste aux zones du corps couvertes par la tunique de lin fin blanc, mais aussi l'absence de détails dans ces zones. Le noir, couleur d'origine probable de la perruque, a disparu ou n'a pas été appliqué. Les yeux également ont perdu leur noir. Le pagne, qui descend aux genoux, est recouvert par une fine et ample tunique.
La peau pâle des femmes (selon la convention égyptienne) est largement couverte par la grande robe fourreau blanche qui les moule, dont l'éclat est rehaussé par les bijoux dont elles se sont parées. L'épouse tient dans sa main droite repliée un bouquet, et dans la gauche une laitue. Sa fille porte devant elle un superbe bouquet monté surmonté de trois ombelles de papyrus ouvertes.
Devant les protagonistes, les offrandes s'entassent sur la table jusqu'à la partie haute du registre, chaque division étant soulignée par des nattes vertes. Dans l’esquisse les verts, bleus et rouges/bruns sont en place, mais d’autres détails, comme les corbeilles, ne sont qu’ébauchés. En haut, nous trouvons divers vases, encadrés de fleurs de lotus ouvertes (NB : rappelons que ce que l'on a coutume d'appeler 'lotus' sont en réalité des lys d'eau). En dessous, des vases larges, dont certains s'apparentent à des cratères, séparés par des tiges de papyrus. Plus bas encore, un amoncellement hétéroclite, dont les détails ne sont pas toujours reconnaissables, associe canards et autres volailles, pièces de viande, pains, paniers de raisin, de courges…et même un petit veau, au milieu et à gauche. Dans la partie basse se trouvent quatre braseros sur de petits guéridons, associés aux récipients à offrandes, qui serviront à brûler les viandes et les résines aromatiques. Les cassolettes contiennent du charbon de bois teinté en bleu. Tout ceci est précisé par le texte sus-jacent : "Placer de la myrrhe sur la flamme pour Osiris, Premier des Occidentaux (= les défunts), pour Hathor, maîtresse du Désert de l'Ouest".
Entre chaque brasero se trouve une haute laitue, plante en rapport avec le dieu Min. Ithyphallique, ce dernier est un dieu de la procréation. Son association à la laitue (de type romaine) tient à la sève blanche qui s'écoule de la tige coupée d'une part, et à son développement sous forme d'une tige verticale de la partie centrale de la plante si elle n'est pas cueillie.
La scène a été partiellement défigurée par une croix chrétienne malhabilement tracée.
2) -Les trois registres consacrés au bétail du temple d'Amon
En haut, les animaux sont en pâture, et on distingue d'ailleurs très bien les buissons bas dans le paysage. Deux petits veaux, dont l'un est en train de bondir, sont présents au centre de la composition.
Sur le registre sous-jacent, des bouviers tenant un stick et une corde dirigent les animaux (). L'artiste a tenu à casser la trop grande rigidité de la composition grâce aux veaux qui gambadent devant les adultes, et sur lesquels leurs mères se penchent avec tendresse.
À l'arrière, un taurillon plus grand est manifestement difficile à contrôler ! Les pattes agitées et fines des animaux contrastent avec leurs corps massifs et statiques.
Le troisième registre nous montre où vont tous ces animaux : ils doivent être marqués. Cette opération est effectuée par deux hommes, que l'on voit imprimer la marque chaude sur le cuir des jeunes bêtes qu'on a renversé à terre pour faciliter l'opération ("le jeune troupeau d'Amon"
). On remarque une opposition entre les formes anguleuses et les formes ovales produites par le corps des animaux, les postures des têtes (menton - poitrine), la rétraction des queues vers l'intérieur du corps ; les bouviers et taureaux sont imbriqués les uns dans les autres, et l'ensemble rend bien l'atmosphère survoltée du moment ().
Le marquage du bétail n'a pas toujours existé en Égypte ancienne. Ainsi, à l'Ancien Empire, on n'en trouve pas trace. La pratique est par contre avérée au Nouvel Empire, et notamment à partir de la XVIIIème Dynastie.
À droite de ces trois registres, nous trouvons les inévitables scribes, qui notent tout. Les deux du haut sont assis en tailleur, et reportent sur la feuille de papyrus devant eux, le nombre, le sexe et l'âge des animaux. La scène est commentée () : "Rapportons toutes ces bonnes nouvelles des bouviers au scribe royal Ouserhat, le représentant du Héraut"
. Ces documents administratifs sont importants pour Ouserhat, qui devra rendre des comptes au Palais. C'est pourquoi ils sont soigneusement serrés dans un coffre par un troisième scribe, après avoir été montré au maître.
Un texte en hiéroglyphes bleus s'étend depuis le dessus d'un des coffres jusqu'à Ouserhat, assis sur un tabouret pliant. Il tient dans sa main droite sa longue canne de fonction (remarquer le petit "crochet" près de la main). De la gauche, il serre une pièce d'étoffe.
3) - Ouserhat est aussi responsable du pain, et donc du grain
Dans les deux registres sous-jacents, c'est la phase finale de cette activité qui va nous être montrée. Ouserhat a choisi de faire figurer les scènes agraires, si fréquentes dans les tombes de l'époque, en commençant par le registre le plus bas, très endommagé, mais où l'on reconnaît cependant encore la moisson, des glaneuses, des paniers en cours de remplissage, et sur la droite, trois femmes qui arrachent du lin.
Plus important pour Ouserhat est le registre du dessus, car il montre une cohorte de neuf paysans amenant leur riche récolte (), dont ils font des tas devant les fonctionnaires. Le premier homme devant la meule de gauche diffère des autres ; il est habillé d'une longue tunique de lin fin, appuyé sur une canne de fonction, avec la jambe légèrement pliée (une attitude qu'on voit plutôt au Moyen Empire) : tout en lui indique que son statut social est nettement supérieur à celui des pauvres bougres qui le suivent.
À droite, les chefs des paysans, respectueusement courbés, rendent compte des récoltes à deux scribes, qui notent soigneusement. Un texte commente la scène () : "Recevoir ce qui rentre dans le grenier du [Héraut] par le grand Confident du Seigneur des Deux Terres, le vrai scribe royal, que le roi aime, le député du Héraut, supérieur du bétail [d'Amon], Ouserhat, Juste de Voix".
Encore plus à droite, nous retrouvons Ouserhat dans une attitude tout à fait superposable. La meilleure préservation montre mieux son grand collier Ousekh. Entre les deux représentations, et manifestement pour meubler un espace qui serait autrement resté vide, l'artiste a accumulé diverses denrées : paniers, corbeilles, oiseaux. Peut-être ont-elles été apportées par les deux bouviers qui "flairent la terre" devant le maître ?
La force magique du dessin et de l’écriture confère l’éternité à ces scènes qui montrent l'intégration du défunt au système pharaonique de la Maat, par le biais de sa participation à des tâches générales, maintes fois répétées dans les scènes tombales. Mais que l'on ne s'y trompe pas : ce que le défunt espère, ce n'est pas de refaire dans l’au-delà les tâches de sa vie terrestre, mais bien de recevoir de nouveau les honneurs et la reconnaissance qui y étaient attachés !
La suite des scènes en rapport avec les responsabilités civiles d'Ouserhat se trouve dans la chambre A2, sur une portion du mur Nord ; ces activités sont en rapport avec l'armée, nous verrons pourquoi.
A2, MUR Sud
Longueur = 4m.
La pièce A2 correspond à la partie du hall transversal situé à droite en entrant. Comme nous l'avons déjà dit, il est plus logique de continuer par ici, pour terminer les scènes en rapport avec les responsabilités civiles d'Ouserhat. La présence de ces scènes à cet endroit inhabituel est due aux problèmes géographiques déjà évoqués.
La paroi est divisée en deux parties distinctes : sur les 2/3 gauche environ, les rapports d'Ouserhat avec l'armée, et sur le 1/3 restant, l'hommage du défunt à son souverain Amenhotep II.
Ouserhat et l'armée
Il s'agit ici d'une représentation rare, fort bien conservée, et dont certaines parties ont contribué à la réputation de la tombe. La paroi est divisée en deux zones, séparées par des portes, qui suggèrent la présence d'un entrepôt entouré d'une clôture : à gauche, nous sommes à l'extérieur tandis qu'à droite, nous sommes à l'intérieur. Les scènes forment un chiasme : aux trois registres supérieurs gauches correspondent les deux registres inférieurs droit, et aux quatre supérieurs droit, les deux inférieurs gauche.
Une des fonctions principales d'Ouserhat, nous l'avons vu, est "Comptable du Pain". A ce titre, il se devait de fournir les rations de l'armée. Rappelons-nous que, à cette époque, il n'y a pas de monnaie. Le pain représente une partie de la solde des soldats, dont l'intégralité est versée en nature.
1) - Les trois registres supérieurs gauches
Ils montrent les recrues qui, sac vide en main, viennent chercher ce qui leur est dû à l'entrée de l'entrepôt (). L'ordre règne grâce aux officiers munis de badines, qui les font aligner en deux files parallèles (regardez bien : ils sont dédoublés, ). Au troisième registre, deux arbres ont été ajoutés par l'artiste pour rompre la monotonie. L'habillement permet de distinguer les soldats, vêtus d'un pagne court à résille (en cuir), des officiers que leur habillement de qualité supérieure fait immédiatement reconnaître. Ils sont deux au registre du haut, et peut être l'homme de droite est il Ouserhat lui même, puisque deux recrues "flairent la terre" devant lui. On ne peut pas en être sûr, car les inscriptions n'ont pas été placées dans les colonnes.
2) - Les deux registres inférieurs droits
Ils répondent aux précédents. Les recrues de corvée sont dans l'entrepôt et se dirigent vers la sortie, les bras lourdement chargés des pains qui vont être distribués. Un surveillant muni d'un fouet à double lanière s'assure que tout se passe correctement. On remarquera que l'artiste, encore une fois pour rompre la monotonie, a varié les couleurs de peau.
3) - Les quatre registres supérieurs droits
Ils nous montrent une scène inhabituelle : des hommes prenant leur repas. Le geste de manger est rarement montré en Égypte alors que celui de boire est un sujet courant. Sur les deux derniers registres du bas, les six hommes sont certainement des officiers supérieurs ; ils portent des tuniques et des colliers et certains hument l'odeur de fleurs de lotus, comme s'ils étaient les hôtes d'un banquet. On note même la présence d'un serviteur. Chacun possède sa propre cruche de vin ou de bière, ainsi qu'un récipient pour le pain. Le menu consiste principalement en pains ronds ou triangulaires, mais des paniers peu profonds contiennent d'autres aliments qu'il est impossible d'identifier.
Les huit participants assis sur les deux registres du haut semblent apporter toute leur attention à leurs miches de pain (dont le nombre est inférieur à celui des officiers plus gradés) ; leur grande amphore ne semble contenir que de l'eau. Leurs vêtements sont identiques à ceux des hommes figurant sur le registre inférieur, mais les ornements de fête sont absents. Ce sont manifestement des officiers de grade inférieur.
4) - Les deux registres inférieurs gauches
Ils comptent parmi les plus célèbres -et rares- de la peinture égyptienne, et montrent une activité qui n'a rien de banal dans toutes les armées du monde : la coupe des cheveux des soldats. Ici, l'artiste nous donne un exemple de son talent, en représentant les hommes avec vie, naturel, et un certain sens de l'humour.
Deux coiffeurs exercent leur art et rasent (?) deux recrues penchées en avant.
Les autres recrues attendent leur tour. Les hommes sont tous assis, certains par terre, d'autres sur des tabourets ou des pliants (pourtant en principe considérés comme des sièges de notables). Sous le grand arbre, deux hommes font une sieste, tandis qu'à leur droite, deux autres se partagent un pliant trop petit pour deux.
Ouserhat devant le Pharaon Amenhotep (Amenophis) II
La représentation du défunt devant le roi vivant à son époque fait partie des scènes classiques dans les tombes privées depuis la XVIIIème dynastie. Elle se trouve en principe sur un des murs de fond du couloir transversal. Il s'agit d'une scène dans laquelle le roi est habituellement assis sous un kiosque, recevant le défunt qui s’approche avec des présents.
L'idée sous-jacente est de renforcer le rôle du souverain, qui s’occupe de ses fonctionnaires dévoués jusque dans la médiation du passage vers l’au-delà.
Le kiosque royal devient ainsi un point de jonction dans le passage entre les mondes, un endroit où le défunt présente au souverain les résultats de son activité terrestre, et en retire la considération du roi, et donc sa faveur pour la vie future.
1) - Le pharaon
Dans la TT 56 cette scène est décalée, et le souverain regarde la porte du couloir principal. Le socle du kiosque n’est pas mis en couleur, ni inscrit. Deux colonnes à chapiteaux lotiformes s’élèvent aux extrémités. Leurs fûts sont ornés de rectangles de couleur (bleu/rouge/vert), séparés par des bandes dorées. Ils supportent la corniche sur laquelle trône une frise d’uræus. Cet édifice léger était probablement disposé en plein air, car derrière Ouserhat, on aperçoit un pilier qui pourrait entrer dans la composition d'une cour péristyle.
L’intérieur du kiosque est coloré en jaune, et le roi, ainsi que les inscriptions, se détachent vivement. Le souverain est assis sur un trône classique de forme cubique, avec dosseret bas. Celui-ci est orné de bandes horizontales (bleues, vertes, bleues, rouges), la base droite, ornée du Sema-Taouy, étant jaune.
Pharaon est représenté comme régnant vivant. Une partie du visage est endommagée, notamment les yeux et la bouche, mais le profil typique de son nez charnu et busqué de type Touthmoside est bien reconnaissable. Il porte une perruque noire longue, se raccourcissant vers la nuque. Sur la perruque est posée la couronne à plumes Andjti, composée de cornes de bélier et vache, combinée à trois plumes d’autruche (bleu foncé, bleu clair, rouge), flanquée de deux uræus. Amenhotep est vêtu d’une tunique royale rouge à points jaunes, et d’un pagne long. Une large ceinture jaune maintient le devanteau et la queue de taureau. Les bijoux sont de larges bracelets autour des bras et poignets (jaune / bleu /rouge) ainsi que le pectoral à cinq rangs.
Dans sa main gauche, Amenhotep II tient un signe Ankh, et fait rarissime sinon unique, dans sa main droite il brandit une hache de guerre (habituellement il s'agit de la crosse Heqa ou du fouet Nekhakha, plus rarement d'une massue).
Dans l’espace libre devant le trône, on notera les cartouches de son nom de couronnement et de son nom de naissance "Aa-kheperou-Ra", "Imn hetep netjer heqa Ouaset"
, soit "Grands sont les devenirs de Ra", "Amon est satisfait, le dieu et souverain de Thèbes"
, entourés d'un texte court (). L'ensemble est protégé par l’image de la déesse-serpent tutélaire de la Basse Égypte, Ouadjet, qui se love autour d’un papyrus. Le texte à gauche des cartouches dit : "[le roi] donne santé, vie, force, comme Ra, l'aimé de Ouadjet".
Sous le cartouche : "[le roi] donne vie, force, éternellement".
Le roi est accompagné –autre fait rare- de gardes du corps. Ils sont "derrière" lui, en fait sur le mur Ouest, à gauche de la stèle ; nous y reviendrons donc plus tard.
2) - Ouserhat
Autant on peut être sûr que Pharaon était pensé comme vivant, autant il faut comprendre que c'est un Ouserhat défunt qui s'avance vers celui qui, après avoir été son compagnon de jeunesse, est devenu son suzerain et auquel il a, sans nul doute, été d'une fidélité exemplaire. En effet, le mot "mAa khekhou"
qui conclut la dernière ligne de texte en haut, à gauche, après son nom, est réservé aux défunts () : "Amener toute sorte de belles fleurs pour Sa Majesté, par le familier de son Seigneur, le bien-aimé Dieu bon, celui auquel on rapporte toutes nouvelles en raison de son empressement auprès du roi, qui sort du Palais (vie, santé, force) comme aimé, le comptable du pain de Haute et de Basse Égypte et élève de l’école royale, Ouserhat, Juste de Voix."
Vêtu d'un pagne noué sur le nombril, recouvert d'une fine tunique, Ouserhat est coiffé d'une perruque épaisse, mais bizarrement rouge. Il ne saurait être question de retenir l'hypothèse qu'il s'agisse de ses cheveux naturels. A mon avis, la perruque était destinée à être peinte en noir, mais a été laissée à l'état d'ébauche. Dans un probable souci d'humilité, Ouserhat ne porte aucun bijou. Il brandit devant lui une sellette qui porte une composition faite de mandragores surmontées de deux grappes de raisin. De la table tombent deux séries de fleurs de lotus, et un long sarment de vigne chargé de grappes. De chaque côté - mais il faut bien sûr comprendre à part - le défunt apporte deux compositions florales de trois tiges de papyrus dont les ombelles sont ouvertes, et autour desquelles ont été noués des corolles de fleurs.
A1, MUR EST
Longueur = 1,86m.
Toute la paroi est centrée par une pseudo stèle fausse porte, autour de laquelle sont réparties des saynètes de signification funéraire. En effet, la fausse porte sert de point de passage magique qui fait communiquer le monde terrestre et l'au-delà. Il est donc logique qu'on ait fait figurer à son contact des épisodes entrant dans le cadre d'un rite de passage, celui de l'ouverture de la bouche.
Dès le premier coup d'œil, on voit que le panneau est déséquilibré en raison d'un défaut de symétrie. Au niveau du registre supérieur, le trait vertical de séparation n'est pas médian. De plus, la fausse porte sous-jacente apparaît légèrement penchée vers la gauche.
1) - La fausse-porte
Il s'agit d'un trompe-l'oeil peint en rose, ponctué de rouge, qui doit rappeler la couleur du granit d'Assouan, le plus prestigieux, mais inabordable. Pour parfaire l'illusion, les textes hiéroglyphiques sont réalisés en un bleu clair, couleur qui aurait été utilisée sur le vrai granit.
Les colonnes de textes proclament () :"Offrande que fait le roi à Ra-Horakhty : Qu’il donne à voir le soleil le matin au Ka du Supérieur du bétail d’Amon, Ouserhat, Juste de Voix.
Offrande que fait le roi à Amon-Ra : Qu’il veuille bien donner tout ce qui quotidiennement est amené à son autel pour le Ka du comptable du pain Ouserhat.
Offrande que fait le roi à Anubis […] il veuille donner.. toutes les choses bonnes et pures […] offrandes Hnkt et toutes les offrandes de la fête du jour de l'an [variante : toutes les jeunes plantes]. Pour le ka du scribe Ouserhat.
Offrande que fait le roi à Osiris, le grand dieu, qu’il veuille donner toutes […] choses pour le ka du scribe Ouserhat..
Celui qui est honoré par Amset ; Ouserhat qui est devenu un Osiris.
Celui qui est honoré par Douamoutef, l’Osiris Ouserhat.
Celui qui est honoré par Hapi, l’Osiris, le scribe Ouserhat.
Celui qui est honoré par Kebehsenouef, l’Osiris, le scribe Ouserhat".
Dans ces formules, il est fait référence à Ra, Amon, Anubis, et aux Quatre Enfants d'Horus (voir sur ce thème). Au Nouvel Empire, les formules anciennes d'offrandes faisant intervenir le roi comme intercesseur sont maintenues ; néanmoins, maintenant c'est le défunt lui-même qui entre en contact avec les dieux pour les orienter favorablement à son égard.
Ouserhat n'est pas représenté sur les montants de la porte ; par contre, juste au-dessus de la partie centrale, une petite scène abîmée montre le couple Ouserhat / Moutneferet assis devant une table d'offrandes ().
De chaque côté de la porte se trouvent des scènes en rapport avec le rituel d'Ouverture de la bouche : à gauche, deux scènes de purification ; à droite, l'utilisation des instruments traditionnels.
Les deux scènes de purification de gauche
Elles nous montrent les protagonistes sur des nattes. Ouserhat est assis sur un siège à pattes de lion, coiffé d'une perruque et revêtu de sa grande tunique blanche au-dessus de son pagne. La main droite, repliée sur la poitrine, serre une pièce de tissu, tandis que la gauche est tendue au-dessus des offrandes posées sur la table devant lui. Dans les deux cas, un prêtre lecteur (Xry-Hbt) fait une purification d'eau (représentée comme un zigzag bleu) à l'aide d'un vase.
En haut, c'est un vase nemset
().
Légendes : "Le comptable du pain Ouserhat" ; "Récitation du prêtre officiant : 'A quatre reprises, on tourne autour de lui, avec quatre vases d’eau Nemset. Pureté, pureté de tous les dieux qui sont purs' ".
En bas c'est un vase desheret
qui est utilisé : "Récitation du prêtre officiant : à quatre reprises on tourne autour de lui, avec quatre vases d’eau Descheret. Ta pureté est celle d’Horus ; La pureté d’Horus est tienne. Pureté pour ton Ka".
L'application des instruments est représentée sur le côté droit
Les images d'Ouserhat et de la table d'offrandes sont le miroir de celles que nous venons de voir. Le ritualiste du haut, armé de sa longue herminette Noua
, va toucher les orifices du visage, pour leur permettre de retrouver leur fonctionnalité il commençant par la bouche, comme le texte le précise (a1_e_05) :" J’ai ouvert ta bouche avec l’outil Noua d’Anubis, celui avec lequel est ouvert la bouche des dieux et des déesses. Pur, pur ! Quatre fois"
. La scène du bas est très détériorée. Cette fois, le prêtre utilise l'instrument Ouret-hekaou
(litt : "grande de magie") : "j’ai ouvert ta bouche avec l’outil Ouret-hekaou, celui avec lequel est ouvert la bouche des dieux et des déesses
L'emplacement de ces scènes à cet endroit ne doit bien sûr rien au hasard : si l'on se réfère au plan, c'est dans en bas de la paroi Est qu'est creusé un des puits funéraires par lequel la momie a gagné son caveau. C'est donc bien ici que devait se dérouler la cérémonie.
2) - L'étrange registre du haut
Du côté droit, nous trouvons un couple assis devant une table d'offrandes, et, devant eux, un personnage vêtu de la peau de panthère caractéristique des prêtres-sem en train d'officier. Le texte () nous renseigne sur le nom de la femme : Byky (inconnue par ailleurs) et sur celui de l'officiant, leur fils Ousy. Par contre, celui de l'homme a disparu. La légende dit: "Faire l'offrande royale, deux fois pure, consistant en toutes choses bonnes et pures, offrandes henket et toutes les offrandes annuelles ; respirer la douce brise du Nord chaque jour, pour vos Kas, deux fois purs, par votre fils, […] (de) Thèbes, Ousy doué de vie et bienheureux"
. Ces personnes étaient certainement apparentées à Ouserhat d'une manière ou d'une autre.
Du côté gauche
Il est fait référence à un lien curieux avec un certain Iamounedjeh, probablement d'une génération antérieure à Ouserhat, qui était "Premier Héraut Royal" ; "Directeur du Portail"
pendant le règne de Thoutmosis III (père d'Amenhotep II) : "idnw wHmw tpy iAmwnDH"
. Celui-ci est accompagné par sa femme Henoutneferet. Il a été montré que cette personne ne peut pas être la fille homonyme d'Ouserhat.
Le texte () proclame : "Le premier Héraut de sa Majesté le seigneur des Deux Terres, Iamounedjeh, Juste de Voix auprès du grand dieu ; sa femme, qu'il aime, la maîtresse de maison, la dame de cour, Henoutneferet, Juste de Voix".
Iamounedjeh, connu par sa propre tombe, TT 84, située plus haut sur la falaise, était donc Héraut Royal, tandis qu'Ouserhat est nommé "Représentant du Héraut"
. Donc, Iamounedjeh était son supérieur. Les titres se reconduisant souvent au sein des familles, le Héraut pourrait avoir été le père ou le beau-père d'Ouserhat.
Le couple est représenté avec un grand bouquet, le "bouquet d'Amon", dont il est précisé qu'il vient de Henket-Ankh
, le temple de Millions d'Années de Thoutmosis III (). Ce bouquet est habituellement offert au cours de la Belle Fête de la Vallée (voir plus loin), lorsque les offrandes sont traditionnellement faites aux parents défunts. Ici, c'est le fils, Mery, qui fait l'offrande à ses parents : "Pour vos Kas, un bouquet d'Amon-Ra"
Au pied de la fausse porte, se trouvent les restes d'une dalle qui avait été réservée dans le rocher. A l'origine, il s'y trouvait certainement une table destinée aux offrandes.