La tombe thébaine 295 de Djehoutymes,
encore appelé Paroy

Elle se trouve à el-Khokha (cf , d'après Kampp). On y entre de nos jours par une ouverture située dans  : on descend dans un court passage pour remonter presque aussitôt (). Le fait que des marches ont été taillées indique que cette ouverture n'a pas été réalisée à des fins de pillage mais pour une réutilisation du monument.

La tombe TT 295 date de l'époque de Thoutmosis IV ou de son fils Amenhotep III.
Le monument a été découvert par Robert Mond en 1915, puis perdu et redécouvert par El Sayed A. Hegazy en 1976.
Le propriétaire est Djehoutymes, encore appelé Paroy, qui porte les titres de "Supérieur des secrets dans le Coffre d'Anubis", "prêtre-sem dans la Place d'Embaumement", "embaumeur", "scribe" auxquels s'associent quelques titres honorifiques : "grand ami", "porteur de sceau du roi de Basse Égypte", "scribe royal de […]".
Ses parents sont le "prêtre-sem de la Place d'Embaumement" Sennetjer et la "maîtresse de maison, Senemiahbet". Quatres épouses sont mentionnées : Neferetiry (la plus souvent citée), Tepi, Isis et Renenoutet. On trouve les noms de deux enfants, Houy et Henoutouadjheb.

La salle décorée

La tombe comporte deux salles ; l'une est décorée et on accède à la seconde, anépigraphe, par une ouverture dans le mur nord : c'est là qu'est creusé le puits funéraire.
La salle décorée est rectangulaire et mesure 4,33 × 1,86m pour une hauteur variant entre environ 1,80 et 2m.
Les parois sont faites d'un calcaire de mauvaise qualité, comportant de nombreuses fissures qui ont été rebouchées à l'aide d'un mortier ; elles ont ensuite été enduites de mouna et recouvertes d'un badigeon blanc sur lequel le peintre a posé les couleurs. Celles-ci ont gardé leur éclat d'origine sur les parties du décor qui ont survécu. Le bleu, couleur coûteuse, est ici largement utilisé et particulièrement bien conservé. Un certain nombre de zones ont été vernies : peau lorsqu'elle n'est pas recouverte d'un vêtement, bouquets, colliers, perruques, coussins.
Toute la partie supérieure des parois est ornée de frises de khakérous (trois styles différents) reposant sur une ligne de rectangles de couleur qui se prolonge verticalement aux extrémités.
La base des registres est soulignée par deux lignes épaisses, jaunes et rouges.
La plupart des visages ont été détruits, sans doute peu de temps après l'abandon de la tombe, destructions volontaires auxquelles il faut ajouter celles de certains prêtres par les zélateurs d'Akhénaton lors de l'épisode amarnien. Des restaurations - plutôt maladroites - ont été effectuées à la période ramesside, lors de la première réutilisation de la sépulture et un puits funéraire a été commencé dans l'angle nord-ouest, mais sa profondeur ne dépasse pas 50 cm.

MUR EST

C'est celui que l'on découvre en se retournant après être entré dans la pièce. Il comporte quatre registres dont le premier, celui du haut, est le seul à n'être pas mutilé par le trou d'entrée ; il occupe la moitié de la hauteur pariétale, autant que les trois autres registres réunis.

Le registre 1 (haut)

À gauche, nous trouvons "Osiris, à la tête des Occidentaux, seigneur de l'éternité" assis dans une chapelle à fond jaune d'or. Des colonnes papyriformes et palmiformes soutiennent un toit formé d'une corniche à gorge surmontée par une frise d'uraei protecteurs. Assis sur un siège archaïque classique, coiffé de sa couronne Atef, le dieu tient en main les insignes de son pouvoir régalien : le sceptre héqa et le fouet nekhakha. Devant lui, une colonne florale composite terminée par un bouquet de papyrus se courbe vers son visage. Le défunt est debout devant le dieu, en adoration, et lui présente des offrandes disposées sur une table : végétaux, pains, morceaux de viande. Il est vêtu d'une tunique blanche, porte autour du cou un grand collier ouser ainsi que des bracelets aux poignets et aux bras ().

À droite, le premier personnage masculin derrière Djehoutymes apporte un magnifique bouquet monté constitué de lotus (fleurs et boutons) et de papyri, ainsi que deux canards ().
Au-dessus du défunt et de son suivant on trouve un texte mutilé : "Adoration à Osiris […] embrasser la terre pour Ounnefer par ceux qui suivent les pas du souverain au nord et au sud. Paroy, juste de voix, qui présente toutes bonnes fleurs et plantes".

Vient ensuite un groupe de femmes. De la première, la mère du défunt, seul persiste le bas du corps. Elle est suivie par une enfant du nom de Youya qui tient une fleur de lotus () ; derrière elle se trouve sa mère, largement détruite, qui étend sur la tête de sa fille une main protectrice. Les deux femmes les plus à droite sont tournées en sens inverse des premières ; il s'agit d'une mère et de sa fille Moutneferet.

Les registres 2 et 3

Ils sont consacrés au rituel d'ouverture de la bouche (dont la recension la plus complète se trouve dans ). On y retrouve une scène assez intrigante. Un prêtre est représenté à deux reprises revêtu d'une gaine très serrée, striée horizontalement de rouge, ne laissant dépasser que la tête. L'un est assis, l'autre allongé sur une sorte de lit bas dont les pieds sont des pattes recourbées vers l'intérieur.
Il s'agirait de la représentation du prêtre-sem pendant le rituel d'ouverture de la bouche dans deux états, "dormant" et "éveillé". Selon Budge, le prêtre-sem est d'abord "endormi", état pendant lequel il voit son "père" (c.-à-d. le défunt) dans "toutes ses manifestations". Alors il se réveille et raconte ses visions. On a suggéré que le prêtre-sem agirait comme le premier magicien égyptien et que l'ensemble de la scène correspondrait - à la manière chamanique- à une sorte de transe pendant un pseudo-sommeil. Ce rituel semble avoir un lien avec le mystérieux Tekenou.
Les momies dressées appartiennent à d'autres scènes du rituel d'ouverture de la bouche ().

Registre 4

()

Les quelques colonnes de texte qui ont survécu sont des listes d'offrandes écrites en hiératique, avatar des listes sous forme de "pancartes" qu'on trouve dans d'autres tombes. Chaque colonne débute par le nom d'un "donateur", suivi d'une courte formule rituelle et de l'identification de l'offrande.

MUR NORD

La paroi est divisée en deux parties par l'ouverture menant à la seconde chambre et au complexe souterrain avec la chambre funéraire.

Côté gauche (ouest)

Registre supérieur

Le couple Djehoutymes-Neferetiry est assis devant une table sur laquelle sont empilés pains, raisins, viandes, oignons et fleurs de lotus (, ). L'homme tient un bouquet dans sa main gauche et étend la main droite vers la table d'offrandes (). La dame porte une robe collante à une bretelle, laissant libre un sein - une convention de représentation.
Au-dessus du couple on trouve ce texte () : "Le prince, le comte, le grand ami, l'aimé de son seigneur, celui qui marche dans l'horizon d'Horus, celui dont la maison est pleine de ce que ses pieds ont apporté à chaque saison, le porteur de sceau du roi de Basse Égypte, le chef de la maison des archives, le scribe royal de […]".
Une "pancarte" était destinée à recevoir des listes d'offrandes : les colonnes ont été tracées mais sont restées vides.

À gauche de cette scène, on distingue encore - difficilement - ce qui reste du prêtre-sem qui officiait. Il a été martelé par les zélateurs d'Akhénaton, très probablement parce qu'il avait revêtu une peau de panthère (pour des détails sur ce point, voir ).

Encore plus à gauche, le registre se subdivise en deux sous-registres portant chacun des scènes dites de banquet. Sur le sous-registre du haut, les invités sont des hommes dont un seul persiste partiellement ; sur celui du bas, on trouve quatre femmes assises sur des coussins posés sur des sièges bas ().
L'inscription en surplomb dit () : "Une offrande que donne le roi et Rê, des offrandes royales que… donne… Puissent-ils accorder toute chose bonne et pure pour le Ka du scribe royal, le prêtre lecteur en chef, Sennetjer, juste de voix. Par le fils de la fille de sa fille, qui fait vivre son nom, le prêtre-sem dans la Place de l'Embaumement."

Registre inférieur

À chaque extrémité se trouvent deux couples assis qui se font face. Ils sont quasiment l'image en miroir l'un de l'autre. Au pied du couple de gauche, une petite fille est assise sur un coussin rouge posé sur une petite chaise. Le centre de la scène est complètement détruit, mais quelques traces permettent d'affirmer qu'un homme se tenait devant chacun des couples ; il s'agissait peut-être de prêtres-sem martelés sous Akhénaton.

Côté droit (est)

Registre supérieur

Deux couples assis à chaque extrémité regardent le centre de la scène qui est complètement détruit. Chaque groupe fait l'objet d'une lustration rituelle, matérialisée par la présence d'une fine ligne ondulée qui les entoure. Elle est pratiquée par les prêtres qui occupaient le centre de la scène.

Le couple de droite est le mieux conservé ; une petite fille - l'enfant du couple - est assise au pied de sa mère. Tous les trois portent une fleur de lotus. Sur la table d'offrandes qui se trouve devant eux s'empilent pains, raisins, viandes et oignons.
Deux textes sont inscrits en hiéroglyphes colorés au-dessus de ce couple. Premier texte : "Offrandes que donnent Anubis, Geb, Osiris et Toth à la Grande Énnéade, la Petite Ennéade, les chapelles de Haute Égypte et les chapelles de Basse Égypte. Afin qu'ils donnent pain, bière, bétail, gibier, toutes choses bonnes et pures. Par son fils, qui fait vivre son nom, le prêtre-sem de la Place de l'Embaumement…"
Second texte (en fait une continuation du premier) : "Pour le Ka du suivant de son seigneur, conformément à ses déplacements dans les pays étrangers du sud et du nord. Le scribe, l'embaumeur dans la Place de l'Embaumement, le Supérieur des secrets dans le Coffre d'Anubis… son épouse, la maîtresse de maison, Tepi, juste de voix".

Le couple de gauche est quasiment l'image en miroir du précédent, mais est très mal conservé (). Texte : "Être assis dans le pavillon pour passer du bon temps, recevoir les cadeaux qui arrivent, par celui qui suit roi conformément à ses déplacements dans les pays étrangers du sud et du nord. Le scribe, l'embaumeur dans la Place de l'Embaumement, le Supérieur des secrets dans le Coffre d'Anubis… son épouse, la maîtresse de maison, son aimée, sa favorite, Neferetiry, juste de voix en présence du grand dieu."

Registre inférieur

Sur la gauche se tient une femme tournée vers la droite, qui tient un collier menat dans la main, tandis qu'un sistre est accroché à son bras. À sa droite on devine quelques traces de son fils Houy, penché vers l'avant, et un texte : "… offrandes invocatoires consistant en pain, bière, bétail, gibier et toute bonne chose pure pour ton Ka pur. Sa fille, la chanteuse d'Amon et chanteuse de Mout, Renenoutet, juste de voix". Le reste de la scène est détruit, mais on peut encore lire au-dessus : "Le superviseur de la maison de l'Ouest, Paroy, juste de voix. Son épouse bien aimée, Isis, juste de voix".