MUR OUEST

La paroi est divisée en trois grandes parties. Dans la première, qui occupe presque la moitié de l'ensemble, on voit Paheri dans ses fonctions de scribe et de nomarque. La seconde montre ses activités dans ce que l'on appellera par commodité son domaine privé, et la dernière est occupée par des scènes à caractère funéraire.

PAHERI DANS L'EXERCICE DE SES FONCTIONS

1) Inspection des domaines agricoles et du grain

( et )

Les scènes agricoles de semailles et récoltes occupent trois registres, flanquées d'une grande représentation de Paheri debout ().

Cette représentation est différente de celle du mur d'entrée. Ici, le notable n'a plus de perruque ni de barbe ; il tient en main ses attributs de pouvoir : le bâton de la main gauche et le sceptre de puissance sekhem dans la main droite.
Le traitement anormal de la tête tient probablement à une erreur du sculpteur qui a creusé trop profondément. Il fut impossible ultérieurement de rattraper cette erreur malgré l'application d'un enduit qui n'a pas résisté au temps. Il en reste les fragments d'un double visage dont aucune des sculptures n'a persisté dans un état satisfaisant.
L'inscription qui accompagne cette figuration fait référence à l'écoulement des saisons : "voir la saison shemou (été), la saison peret (hiver) et tous les travaux des champs par le prince de Nekheb, le prince d'Anyt (celui qui) agit en inspectant les terres du sud, le scribe du grain, Paheri, Juste de voix".
Trois aides portant sacs, étoffes et un tabouret accompagnent Paheri dans ses tournées d'inspection.

Comme l'avait fait remarquer Mme Desroches-Noblecourt, les scènes représentées ici sont très intéressantes, car elles couvrent les activités agricoles du pays pendant toute l'année. Ainsi la vie cyclique de l'Égypte est évoquée sur ces murs et participe de l'espérance d'éternité de Paheri : intégré dans ces représentations, il participera aussi pour l'éternité à la vie éternellement renouvelée du Double Pays.

Devant lui (registre 3 à partir du haut) on trouve un char attelé de deux chevaux et dont les rênes et un fouet sont tenus par un palefrenier d'une main, tandis que de l'autre il tient l'arc du maître (). Par son attitude et son discours, il cherche à calmer les ardeurs des animaux : "Reste calme, ne sois pas désobéissant, cheval excellent, aimé de son maître avec lequel le prince peut fondre sur n'importe qui".
Le cheval est un animal récemment introduit en Égypte en ce début de Nouvel Empire. Les artisans égyptiens n'ont d'ailleurs jamais très bien su le représenter, comme ici, où les animaux sont très raides.

La figure en majesté de Paheri fait face à trois registres résumant les travaux des champs pendant les trois saisons de l'année égyptienne. Ainsi est évoquée la succession des mois et des années et donc l'éternité auquel il aspire.

a) - La saison peret (hiver-printemps), première des saisons agricoles est représentée au registre inférieur

C'est le moment de retourner la terre qui a été précédemment amollie par la crue du Nil qui s'est maintenant retirée ( et ). Le travail se fait à la charrue, tirée par des bœufs ou des hommes, ou à la houe, la terre est travaillée pendant que d'autres hommes sèment le grain. Ces différentes manières de retourner la terre correspondent probablement à des types de semis différents.

Les dialogues entre les paysans nous décrivent une situation idyllique : "C'est un beau jour, il fait frais ! Dépêche toi, conducteur, conduis les bœufs, le seigneur est là qui nous regarde". Un autre dit à son camarade : "Hâte-toi au travail, que nous finissions rapidement !" à quoi ce dernier répond : "je vais faire plus que le travail qu'attend de moi le maître !"
À l'extrémité de ce registre on retrouve une figuration du maître debout (), un bâton de commandement dans une main, et le sceptre sekhem dans l'autre, surveillant la bonne exécution des tâches et qui se rend vers les embarcations en cours de chargement au bord du fleuve.
Au passage, il exhorte les paysans : "Hâtez-vous, cultivateurs ! les champs de grain sont divisés (?). L'inondation a été très grande !". À quoi les jeunes paysans qui tirent le joug de la charrue répliquent : "Ils disent : nous faisons (ainsi), vois nous ![…]" et le vieux paysan à l'arrière leur donne la réplique : "Deux fois excellentes sont tes paroles, fils ! L'année est bonne ! […]" ()

b) - Le registre médian montre le temps des récoltes

Sur la gauche, la récolte du lin

Hommes et femmes arrachent les tiges, puis les réunissent en bottes qui seront ensuite portées pour être finalement peignées afin de les égrener.
Le vieil homme qui exécute cette dernière tâche interpelle le jeune qui lui apporte une botte de lin : "Si tu m'en apportes 11009, je suis l'homme qui les peignera toutes !" À quoi l'autre réplique : "Presse, ne bavarde pas, espèce de vieux vantard de paysan !".

 La moisson

Il existe deux variétés de blé : l'une est grande, avec des épis à barbe, l'autre plus petite avec des épis sans barbe. Les faucheurs sont à l'œuvre. Ils tiennent les tiges à épi de la main gauche, et les coupent, très haut, avec une petite faucille courbe dont la lame en bois est incrustée de dents coupantes en pierre. L'un des hommes tient sa faucille sous le bras tandis qu'il boit à une jarre d'eau.
Les faucheurs proclament : "C'est un beau jour pour sortir au champ, le doux vent du nord est arrivé, le ciel fait conformément à nos vœux […]". Derrière les faucheurs, une femme et un enfant courbés en deux glanent les épis. Une autre femme debout les suit avec deux paniers.
À droite, sous une construction légère qui fait office de dai, on trouve des jarres d'eau et de bière dressées sur des socles en bois ou reposant sur le sol. Certaines ont été sorties et sont ventilées pour être rafraîchies, en se servant de la porosité de l'argile du récipient ().

c) - Le travail sur le grain se poursuit sur le registre supérieur

Lui aussi se lit de droite à gauche ().

Sous les ordres du contremaître qui leur dit : "Hâtez-vous, redoublez vos pas ! L'eau arrive et va atteindre vos paniers !", les porteurs de paniers pleins d'épis se hâtent vers l'aire de battage, croisant en chemin deux de leurs camarades qui, le panier vide, retournent au champ (). On voit bien la structure en jonc tressé du panier. Ils proclament : "Le soleil est chaud" mais "qu'il fournira du poisson en paiement du blé.". En effet, la crue du Nil, qui a lieu en été, apportera non seulement les alluvions fertiles, mais aussi une grande variété de poissons.

Sur l'aire de battage, cinq bœufs non muselés foulent les épis (). Le tas est circulaire, plus haut en périphérie qu'au centre. Le bouvier s'adresse à eux : "Battez, quant à vous, battez (= foulez) quant à vous, ô les bœufs ! La paille est pour (vous) à manger et le blé pour vos maîtres. Ne laissez pas vos cœurs se calmer !"

Vient ensuite le moment du vannage (). Pour éviter la poussière, les paysans portent une pièce d'étoffe sur la tête (= le klaft). Le vannage se fait en lançant au vent le mélange de grains et de balle. Des assistants ramassent ensuite le grain sur le sol et l'apportent sur l'aire de stockage où il est comptabilisé par des scribes. Celui qui trône sur le tas est "le scribe du grain Djehouty-Nefer".
Enfin, le grain est mis en sac et porté jusqu'au silo de stockage (). Ce dernier est représenté comme un espace clos contenant quatre silos ainsi qu'un sycomore.

d) - Embarquement des grains

Ce quatrième registre en rapport avec le grain se situe en dessous des trois premiers, sur le demi-registre supérieur consacré aux bateaux. On y voit les sacs être chargé sur un bateau qui, par un de ces raccourcis typiquement égyptien, est également en train de lever l'ancre ( et ) pour aller vers le nord, puisque son mât est rabattu, soit vers un autre lieu de stockage provincial, ou peut-être jusqu'à la capitale, Memphis.
Le texte proclame : "Charger les bateaux avec du blé et de l'orge […] les greniers sont pleins et débordent, les barges sont lourdement chargées et le grain s'en échappe. Mais le maître nous presse de continuer. Voyez, nos cœurs sont en bronze !". Sur la droite et au-dessus, Paheri surveille l'embarquement en même temps que l'ensemble des travaux agricoles.
Dans toutes ces scènes agricoles, il s'agit bien sûr de représenter l'abondance de la production sous la direction avisée du prince ; par la même occasion, cette abondance magiquement retranscrite, se poursuivra pour lui dans l'Au-delà.

2) Le comptage du bétail

Sur la partie basse de la paroi, à gauche, une scène de plus petite taille montre Paheri, assis sur un siège, écrivant (). Paheri est aidé dans sa tâche par "Son frère, qu'il aime, le scribe excellent, parfait de langue, Paheri, Juste de voix". Devant lui ses instruments de scribe, un rouleau de papyrus et un petit broc d'eau, représentés selon les conventions égyptiennes au-dessus du coffret qui les contient.
Le texte est écrit en grands hiéroglyphes : "Compter tout le bétail par le prince de Anyt le chef des intendants des champs du sud, celui qui a la confiance de son maître […]".

Les animaux sont représentés sur quatre registres, amenés par leurs gardiens respectifs : bœufs, vaches et veaux sur les deux registres supérieurs ; ânes, chèvres et cochons aux deux autres registres. Remarquons cette représentation des cochons, rare dans les tombes égyptiennes. Deux scènes de saillie, représentent la fertilité et le renouvellement de la vie.
Les ânes sont conduits par un ânier portant un fouet d'une main et dans l'autre, reposant sur son épaule, un bâton avec une entrave. Certains bœufs sont représentés couchés à terre, entravés, attendant d'être marqués par l'instrument qu'un homme tient au feu. Un homme à terre semble recevoir la bastonnade, punition pour n'avoir pas exécuté correctement son travail.

3) La réception de l'or

Il existait des mines d'or dans le désert de l'est, et le métal devait atteindre le Nil près d'el Kab, donc sous la juridiction de Paheri.
La scène se situe à côté de celle du chargement du grain dans le bateau. Les chefs des mineurs amènent à la pesée l'or qu'ils ont extrait. Celui-ci se présente sous forme d'anneaux (en haut) ou de sacs (en bas) qui sont pesés contre des poids en forme de bœuf. Un homme agenouillé surveille le peson de la balance.
Le texte est très mutilé : "Recevoir l'or des chefs mineurs… recevoir ce qui a été ordonné… par le prince Paheri, dont l'attention est sans faiblesse, qui ne faillit pas dans ce qui lui est confié".
Son frère Paheri l'assiste ici aussi dans l'enregistrement des pesées.
Une nouvelle scène de bastonnade est figurée : l'un des intervenants n'a probablement pas livré les quantités attendues… ou a essayé de subtiliser du métal précieux.

À droite de ces scènes, le navire de fonction de Paheri est représenté deux fois, descendant et remontant le Nil.
Le mât du bateau de droite est rabattu () ce qui montre qu'il va se laisser porter par le courant vers le nord. Le navire de gauche a sa voile déployée, indiquant qu'il remonte vers le sud () ; le pilote tient sa sonde de profondeur, tandis qu'un des marins, penché par-dessus bord, puisent de l'eau. Cette scène avait déjà été relevée dans la "Description de l'Égypte" (). À noter la présence du char de Paheri sur le toit de la cabine dans les deux cas.

4) Surveillance des activités de pêche et chasse des oiseaux au filet

Ces deux activités sont représentées dans le prolongement des bateaux, donc sur deux registres.
La pêche se fait au filet () les poissons attrapés étant ensuite amenés à un vieil homme qui les vide. Ils sont ensuite mis à sécher (). Deux pêcheurs fabriquent ou réparent un filet à l'aide d'une navette et une corde de hâlage.
La chasse aux oiseaux sauvages dans les marais où ils sont abondants se fait ici à l'aide de filets (). Sur l'ordre d'un vieil homme dont le buste sort du fourré de papyrus, les neuf traqueurs rabattent leur filet. Quelques volatiles arrivent à s'échapper de la nasse. Les oiseaux ainsi capturés sont plumés, évidés, puis stockés dans des jarres ().
Une grue est amenée à Paheri qui surveille ces activités, appuyé sur un bâton, avec ce texte : "Voir la capture au filet des oiseaux sauvages et du poisson, avoir le visage heureux de (voir) tous les travaux exécutés sur les berges, par le nomarque Paheri" ().

5) Les vendanges.

Cette scène occupe la partie médiane de cette zone de la paroi (voir ci-contre la photo aimablement envoyée par Patrick Kersalé, 2020).
Elle est surplombée par une autre scène qui complète et termine la récapitulation des activités agricoles du nomarque.

Le raisin est amené est cueilli sur la vigne (), puis les vendangeurs le transportent au pressoir ; là, il est foulé par des hommes qui se tiennent à une corde accrochée à une barre. Le vin est ensuite mis en jarres ().
Outre son caractère agricole, cette scène possède également une connotation religieuse. En effet, la vigne et le raisin sont associés au dieu Osiris et à l'inondation. Le sang du dieu assassiné avait en effet été mis en relation avec les premières eaux de l'inondation, car celles-ci sont rouges, en raison des alluvions ferriques qu'elles transportent venant de l'Atbara.

Mur ouest, centre

Paheri et son épouse sous un édifice léger

Cette scène occupe la partie centrale de cette région du mur.

Donc, Paheri et sont épouse Henouterneheh, qui l'enlace étroitement, sont représentés en pseudo perspective, assis sous un dai léger (). Le nomarque tient en main les deux instruments de son pouvoir : le bâton et le sceptre Sekhem. Henouterneheh tient en main une fleur de lotus ouverte, symbole de la renaissance.
Six hommes, disposés sur deux registres, apportent au couple toutes sortes de nourritures et boissons, ainsi que des fleurs.

Ceci se passe en présence de parents de Henouterneheh : son père, sa mère, et son fils "l'officier de Sa Majesté Teti" (). Deux femmes placées en face d'eux leur présentent des onguents et peut être des parfums (dont les cônes portés sur la tête sont une image). L'une d'entre elles, Khnemet, est "musicienne de Nekhbet". Derrière ces trois personnages principaux, huit autres fils et filles étaient représentés sur deux demi-registres. Ils ont quasiment disparu.

Paheri et le prince Ouadjmes

Cette scène du registre supérieur montre une grande figure de Paheri assis sur un siège cubique placé sur une estrade et tenant sur ses genoux le petit prince qu'il entoure affectueusement de ses bras. Ce dernier est nu, portant la mèche de l'enfance sur le côté.
Le texte proclame : "Réjouir le cœur avec toutes choses, faire un jour heureux, recevoir des cadeaux, adorer Nekhebkaou, par le tuteur du fils du roi Ouadjmes, Paheri, Juste de voix".
Devant cette représentation se trouvait une scène qui a presque disparue, qui montrait des adultes et des enfants apportant des offrandes. Certains d'entre eux étaient des enfants de Paheri. Le texte en surplomb n'est que très partiellement lisible : "apporter des offrandes par ses enfants et petits enfants adorant… ".
L'inscription du registre inférieur, où l'on voit un homme et deux femmes portant étoffes et vases, fait allusion à l'apport des biens le jour de l'an.